Publié le Novembre 28, 2018Mis à jour le Août 11, 2023
Après les honneurs d’une deuxième étoile au Guide Michelin, le Blue Bay, situé au sein du Monte-Carlo Bay Hotel & Resort se métamorphose. Nouvel agencement, nouvelle décoration, nouvelle terrasse, nouvelles créations culinaires… Pour Marcel Ravin, l’un des chefs les plus doués de sa génération, c’est la poursuite d’un rêve. D’une conviction et du véritable parti pris de sa partition culinaire. Son style novateur, généreux et sincère est sa signature. Et sa cuisine, une passerelle entre les cinq continents et sa Martinique natale. Rencontre avec celui qui orchestre les cuisines du Blue Bay avec passion, créativité et un amour infini pour le goût et le faire plaisir.
Comment votre cuisine a-t-elle évolué depuis les débuts du Blue Bay ?
Marcel Ravin: Je me suis donné du temps pour constituer des fragments de réalité, des souvenirs de mon enfance. On parle souvent de fusion de saveurs caribéennes et méditerranéennes. Mais la fusion crée la confusion. Ma cuisine est une passerelle et une ouverture sur les cinq continents grâce à l’ADN du monde créole. Et elle évolue en permanence grâce à ma #teamtchok, au dialogue et au partage.
Quoi de neuf du côté de la carte ?
Marcel Ravin: Les menus changent toutes les 3 semaines. Nous travaillons au plus près de ce que nous offre le jardin, la nature, les rencontres afin de pénétrer dans un univers et de développer une écriture culinaire poétique.
Et l’institution qu’est le brunch de Marcel Ravin ?
Marcel Ravin: Nous avons dédié un endroit à la dégustation de notre brunch. Un nouvel espace, le Calypso, qui pourra accueillir un peu plus de 200 convives.
Comment Monaco influence votre cuisine ?
Marcel Ravin: Monaco est la Terre de tous les possibles. Au Blue Bay, les saveurs ne sont pas simplement juxtaposées ou additionnées. C’est une combinaison agencée, structurée, organisée, en corrélation avec ma pensée. Je collabore avec des petits producteurs locaux. Pour n’en citer que quelques-uns : Terrae, La Boucherie Formia ou Le Jardin des Antipodes… Avec eux mes créations sont constituées d’éclats. C’est un acte poétique. Une unité au-delà du visible.
Votre philosophie en cuisine ?
Marcel Ravin: J'ai toujours cuisiné pour l'autre avant de cuisiner pour moi. Mais si je ne prends pas de plaisir - de plaisir intense, je ne peux pas toucher le cœur de mes clients. Je veux créer de l'émotion et rendre les gens heureux. L'autre jour, un client japonais a choisi un de mes plats signatures et m'a fait appeler. Il ne parlait ni français, ni anglais. Il était très ému. Son ami m'expliquait qu'il avait l'impression d'avoir un voile sur les yeux à chaque bouchée. Que ma cuisine l’emmenait vers cet ailleurs qu’est le voyage. C’est un très beau compliment ! C'est comme ça que je travaille. Je veux transporter les gens. Je ne cuisine pas pour faire de l'assemblage. Je construis mes plats pour qu'il y ait une succession de saveurs. Une explosion en bouche.
Quelle expérience voulez-vous faire vivre à vos hôtes ?
Marcel Ravin: Je dis toujours oui aux exigences des clients. Celui qui a juste envie d'une salade mixte doit être aussi bien servi que celui qui veut une assiette de caviar. Sa salade doit être craquante, extrêmement bien assaisonnée… Il n'y a pas de produits meilleurs que d'autres. Il faut respecter chaque envie, chaque goût. Intolérances alimentaires, confessions différentes : il faut savoir s'adapter. Le restaurant doit être ouvert à tous. C’est ainsi que je compose ma carte. C'est ça mon métier ! Nous sommes des artisans du goût au service de nos clients. Il y a des gens qui arrivent à écrire de très belles pièces de théâtre en regardant juste ce qui se passe dans la rue. C'est ainsi que je conçois la cuisine.
Un souvenir gourmand ?
Marcel Ravin: Je vivais avec ma grand-mère en autosuffisance. Nous avions un jardin créole. Nous mangions ce que nous produisions et élevions. Elle cuisinait pendant que j'allais à l'école. Quand je rentrais, il y avait toujours quelque chose qui m'attendait. J'ai développé une mémoire du goût avec elle. C'est quelque chose qui m’a tellement construit que je m'étais toujours promis qu'un jour j'aurai mon propre jardin.
La Green attitude, selon Marcel Ravin
- Le Blue Bay possède son propre potager créé par le Chef en collaboration avec la start-up Terrae, fondée par Jessica Sbaraglia, créatrice de potagers biologiques urbains.
- À chaque saison, son espèce : une charte signée avec « Mr. Goodfish » permet de respecter les ressources marines.
- Labellisation « Restaurant Engagé » pour le restaurant gastronomique Blue Bay.
La magie monégasque pour vous ?
Marcel Ravin: Quand je suis arrivé à Monaco pour la première fois, j’avais 21 ans. Je me suis retrouvé à l’Hôtel de Paris Monte-Carlo et j’ai tout de suite su que j’allais revenir. Je me suis dit : « Rendez-vous dans 10 ans ! » Je savais qu'un jour je travaillerai ici. 20 ans plus tard, on m'appelle, on me fait venir en hélicoptère, on me fait confiance… Un rêve. À travers ma cuisine, je veux contribuer un peu à cette magie qu'est Monaco, car ce lieu m'a tout donné. Travailler ici fut une éclosion. Un jour, S.A.S. le Prince Albert II est venu dîner et m'a dit : « J'espère que vous resterez parmi nous longtemps. » J'ai répondu que tant que Monaco me voudra, je resterai. Cet endroit m'était vraiment destiné...
Pourquoi le Blue Bay est devenu l’une des plus belles adresses de Monaco ?
Marcel Ravin: C’est le fruit d’un long travail voulu dès l’ouverture du Monte-Carlo Bay Hotel & Resort en 2005. D’un certain respect de la nature, d’un engagement à cuisiner et sublimer ce que notre potager nous offre. Des convictions, de l’audace et de la créativité !
Votre deuxième étoile, un rêve ?
Marcel Ravin: Une chose est sûre, je l'ai toujours voulu au plus profond de moi. C’est une affaire personnelle. J’aime la Principauté, le groupe dans lequel nous travaillons et notre magnifique établissement.
Qu’avez-vous ressenti en décrochant cette nouvelle étoile ?
Marcel Ravin: C'était très émouvant pour moi. Vous savez combien je suis attaché à mon île. J'ai pensé à tous ces jeunes qui aimeraient avoir la chance d’entrer dans de belles maisons et d’écrire leur propre histoire. J'ai pensé à ma famille, à mon fils qui est aujourd'hui un adulte. J'aimerais lui transmettre une passion. Pas forcément la cuisine, mais qu'il découvre sa passion, comme moi, j'ai découvert la mienne. C'est devenu ma raison de vivre après mes enfants.
Que signifie pour vous cette deuxième étoile ?
Marcel Ravin: Beaucoup de gens diraient que c'est une consécration, mais pour moi, c'est une continuité d'un travail et d'un engagement. Qu’il est bon de se dire que tout le travail produit est récompensé ! Tout cela est possible grâce aux équipes, mais aussi grâce à nos clients qui nous accordent leur confiance, viennent, et reviennent.
Que retenez-vous en particulier de la cérémonie de remise de cette étoile supplémentaire ?
Marcel Ravin: En voyant tous ces chefs étoilés, j’ai repensé à mon parcours. J'ai eu un sentiment de fierté lorsque j’ai réalisé que je fais enfin partie de ce monde de la gastronomie qui me fait rêver depuis ma tendre enfance. Aujourd’hui, sans aucune prétention, je me sens enfin d’égal à égal avec les autres chefs
Les fétiches de Marcel Ravin
Votre dernière découverte côté ingrédient ? Le Moringa, « l’arbre de vie ».
Votre dernière claque culinaire ? Le « Niwaki », restaurant japonais à Monaco.
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